Les Républicains espagnols

Les Républicains espagnols de la SMMP : sur le Chemin de Mémoire


     Cette plaque rappelle au passant qu'à partir de novembre 1939 environ 500 Républicains espagnols sont transférés vers l'usine SMP de Fumel, devenue SMMP en 1941. ils viennent pour la plupart du camp de « Judes » situé sur la commune de Septfonds près de Caussade (Tarn-et-Garonne). Ils doivent remplacer la main d’œuvre locale mobilisée après la déclaration de guerre à l'Allemagne le 3 septembre 1939.

    A la Libération de la France, ils doivent se rendre à l'évidence : la péninsule ibérique reste sous le joug des dictatures fascistes. Alors ils essaiment dans le grand Fumélois en se fondant dans le tissu local. Aujourd’hui, leur descendance constitue l'une des plus importantes communautés d'origine étrangère.

La Retirada et sa mémoire

    Fin janvier 1939, au moment de la chute de la Catalogne à la fin de la Guerre d’Espagne, des femmes, des enfants, des vieillards, des malades, des blessés et des militaires sont contraints de quitter leur pays. A la mi-février, environ 500 000 personnes ont franchi la frontière française pour échouer dans des camps. C’est la Retirada. Les femmes et les enfants sont envoyés dans des « centres d’accueil » improvisés, répartis sur plus de 70 départements. Les blessés et les malades sont dirigés dans des structures sanitaires provisoires.

    Au printemps, le gouvernement français décide d’employer les hommes valides dans des Compagnies de Travailleurs Étrangers (C.T.E.).  Les C.T.E. sont affectées aux travaux agricoles ou publics et à l’industrie, sans oublier la Ligne Maginot et la Légion Étrangère.

    En janvier/février 1940, l'inspecteur de police Jouannet dénombre 416 Républicains Espagnols sur 1 400 ouvriers. La signature de l’armistice, le 22 juin 1940, provoque le retour de nombreux Espagnols au camp de Septfonds. Mais comme les Allemands continuent de s’approvisionner en tubes d’obus, cela fait revenir les Espagnols à l’usine. En septembre 1940, le gouvernement de Vichy transforme les C.T.E. en G.T.E. (Groupement de Travailleurs Étrangers). Le groupement de Fumel devient le G.T.E. 505.

    Après l’attaque de l’U.R.S.S. par Hitler en juin 1941, les besoins en personnel augmentent afin d’assurer la fourniture des tubes d’obus. Concernant l’année 1942, les Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (A.F.M.D.) dénombrent environ 800 étrangers dans l’usine dont plus de 700 sont des Espagnols.

    Des associations comme MER47 (Mémoire de l'Espagne Républicaine en Lot-et-Garonne) ont vu le jour dans les départements de notre région afin, entre autres, de remémorer cette douloureuse histoire.

    Le vendredi 4 février 2011, dans son intervention lors de l'inauguration de la plaque en hommage aux Républicains espagnols ayant travaillé à l'usine de Fumel, José Gonzalez, secrétaire du C.E. de « Métal Temple Aquitaine » déclare :

    « Cela fait maintenant 70 ans, en février 1939, que 500 000 Républicains espagnols, leurs familles, leurs enfants, fuirent leur pays. Ce fut l'exode, ce que l'on appelle la ‘Retirada’. Après avoir subi les souffrances et les traumatismes de cette guerre sur les terres d'Espagne, ils furent accueillis en France de manière honteuse et indigne par les autorités qui les entassent dans plusieurs camps de concentration dans le grand Sud-Ouest : Argelès, Septfonds, Le Vernet, Gurs… Le camp de Septfonds avait la réputation d'être un camp de transit où les autorités pétainistes récupéraient de la main d’œuvre qualifiée pour faire tourner les usines comme la SMMP de Fumel ou la poudrerie de Sainte-Livrade…

    Dès la fin de 1939, les premiers convois arrivaient de Septfonds sur Fumel dont notre vétéran, notre ami, notre frère, notre camarade Isaac Casarès, jeune républicain de 18 ans, appelé « Luis » pour qu'il ne se fasse pas repérer par la Milice pétainiste sur Fumel. Ces ouvriers couchent dans des conditions inhumaines pour ne pas dire ignobles, sur de la paille, dans des baraquements de fortune et dans de vieux wagons. »

Dans la Résistance

    L'action des Républicains espagnols dans la Résistance française a longtemps été occultée. José Gonzalez le rappelle :

    « Dès la montée en puissance de la lutte armée, les Républicains espagnols rentrent dans les maquis environnants dont le groupe « Soleil » constituant le 4e régiment F.T.P»

    Puis il conclut son discours en ces termes :

    « Nous n'oublierons jamais votre combat, que grâce à cette soif de liberté, l'olivier de la paix s'est couvert de nouveau de feuilles, mêlées aux lauriers victorieux de la République espagnole, de cette 2e République espagnole où nous honorons le 80e anniversaire en ce jour de mémoire, de souvenirs et de recueillement. »

Brève histoire de l’immigration espagnole depuis le XIXe siècle

    L’immigration espagnole est constituée de 4 vagues. La 1re qui ne touche pas spécialement le Fumélois concerne la période de la fin des guerres napoléoniennes avec « los afrancesados » c’est-à-dire ceux qui ont été considérés comme des « collaborateurs » du pouvoir Bonapartiste installé à Madrid jusqu’en 1813. Il y a aussi ceux qui ne supportent pas le rétablissement du pouvoir absolu par les Bourbons. Le plus emblématique d’entre eux est le peintre Francisco de Goya qui quitte son pays en 1823 pour venir s’établir définitivement à Bordeaux. La 2e voit arriver de nombreux Espagnols à la suite des guerres carlistes (1833-1846). La 3e correspond à la révolution industrielle de la seconde moitié du XIXe siècle qui attire beaucoup d’Espagnols en difficulté économique dans leur pays. Enfin la 4e vient combler les besoins importants en main d’œuvre pendant et après la 1re Guerre Mondiale. En 1914, l'usine de Fumel emploie 1 000 ouvriers issus de la population locale et fait appel aux travailleurs étrangers, essentiellement espagnols. En 1918, l’effectif de l'usine de Fumel est passé à 3 000 ouvriers (avec les mineurs qui extraient le minerai). Ce bond a été rendu possible grâce à l’apport des Espagnols et d’une « main d’œuvre d'état » composée d’ouvriers de toute la France, de prisonniers de guerre allemands, d’hommes des colonies, de Portugais, de Grecs, de Vietnamiens…

 

Solidarité avec le peuple espagnol pendant la guerre d’Espagne

    Le département du Lot-et-Garonne, bien que rural se mobilise fortement pour aider les Républicains espagnols pendant la Guerre d’Espagne de 1936 à 1939. Des collectes de vivres, de médicaments et d’armes sont organisées. Des enfants espagnols sont accueillis à Villeneuve-sur-Lot. Lors de la réunion du 23 août 1936 à Fumel, dans une salle qui comptait environ 500 personnes, un ouvrier espagnol se lève pour déclarer qu'il est prêt, avec une dizaine de personnes, à partir se battre pour ses frères Républicains. 9 hommes partent pour combattre dans les rangs des Brigades Internationales. En février 1937, 100 tonnes de marchandises et 60 000 francs de collecte sont donnés à la République espagnole. 

La « Union Nacional Española » à Fumel 

    En juillet 1942, un réparateur de vélos de Libos découvre un tract caché dans la sacoche d'une bicyclette appartenant à un réfugié espagnol. Les gendarmes de Fumel procèdent à 7 arrestations de réfugiés espagnols, mais le chef présumé de ce groupe a le temps de s'enfuir. Un vaste réseau clandestin dénommé « Reconquista de España » est découvert. Il a été mis en place par la « Union Nacional Espanola » qui a pour objectif la préparation de la reconquête de l’Espagne en renversant le régime du dictateur Franco.

    En novembre 1942, de nouvelles arrestations sont ordonnées par la justice toulousaine. Au total, la police procède à plus de 200 incarcérations dans 9 départements du Sud-Ouest.

    Dès 1943, de nombreux Républicains espagnols prennent le maquis en rejoignant les groupes déjà existants comme « Soleil » ou en créant des formations purement espagnoles comme « Carlos ».

 

Une rue pour commémorer la présence des Républicains espagnols

 

    La ville de Fumel a rendu hommage aux Républicains Espagnols, arrivés dès novembre 1939 à l'usine, en donnant le nom de l'un des leurs, Isaac Casarès, à l'occasion de l'inauguration d'une nouvelle rue, le 14 mai 2011.

 

Allocutions de :

 Jean Louis Costes, Maire de Fumel, Conseiller Général



Alain Miranda, Président de MER 47


 Paul Limouzi, Président du comité local de l'ANACR




 

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