Usine de Fumel
La Résistance dans la SMMP : sur le Chemin de Mémoire
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Chaîne de coulée de pièces en fonte à l'usine de Fumel |
Le Front National
Le Front National de lutte pour la libération et l'indépendance de la France est créé le 15 mai 1941 par le Parti Communiste, mais il n’est actif qu’à partir de juillet 1941. Son but est de rassembler tous les mouvements de Résistance y compris les non communistes. Ses moyens : la propagande, la fabrication de faux papiers, les sabotages…
A Montayral, le groupe « Cabannes » est constitué par le colonel Lakanal. Quand il part à l’état-major FTP-F dans le Lot, il est remplacé par Georges Toulza. En 1942, ce dernier a déjà pris contact avec les cellules communistes du secteur de Fumel, avant de diriger le Front National local. Ferragut, Salet, Torikian, ouvriers ou apprentis de l’usine, relaient les mots d’ordre du Front auprès de leurs collègues.
La Résistance s'organise face à Vichy
Ce chapitre est un résumé de la première partie du journal de marche du bataillon « Geoffroy » rédigé par son chef, Jean Vermont.
les prémices de la Résistance
Dès 1942, une étrange atmosphère plane sur le personnel de la SMMP de Fumel. Jean Vermont, chef de service de la « Centrifugation », est conscient que les gens s’interrogent sur la situation de la France par rapport à l’occupation allemande, et le comportement collaborationniste du gouvernement de Vichy. Il constate que les réponses apportées sont « désordonnées ».
Création d'un premier groupe de Résistance
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Journal de marche du bataillon « Geoffroy » |
En accord avec Conti, son second, Jean Vermont organise dans son bureau une réunion clandestine avec des personnes sûres pour aborder ce sujet épineux. Conti vient de l’AS (Armée Secrète), Guitard du réseau « Victoire », Madeline de « Libération ». Vermont n’appartient à aucun mouvement de Résistance.
En mars 1943, après avoir sondé l’état d’esprit de bon nombre de réseaux existants, Vermont est déçu : « trop de paroles, trop de tendance politique, pas assez d’action ». En conclusion de la réunion, il est décidé que ce groupe sera exclusivement militaire, détaché de toute tendance politique et que Vermont en sera le chef.
Le recrutement est aussitôt mis en œuvre. L’effectif atteint rapidement 80 personnes. Le groupe est constitué avec du personnel qui continue à tenir son poste de travail au sein de l’usine. Du fait que cette dernière fournit des tubes d’obus à la Wehrmacht, le personnel n'est pas contraint au STO. Cela signifie que leur engagement dans la Résistance est parfaitement volontaire. La seule manière d'être obligé de travailler pour les Allemands est d’aller dans l’organisation « Todt ». Pour ce faire, des agents de cette administration nazie tentent de recruter à travers des réunions d’information qui se tiennent au cinéma du « Passage » à Fumel.
Le secteur géographique d’intervention est délimité dans un cercle d’un diamètre d’une trentaine de kilomètres dont le centre est Fumel. Il est divisé en 4 sous secteurs pour en faciliter le contrôle. La recherche de futurs terrains de parachutage et de lieux d’embuscade commence.
La formation est dénommée « Geoffroy », car tel est l’alias de Jean Vermont : « […] parce que la clandestinité [oblige] à prendre un nom de guerre. C'est un vieux nom français, bien français, vieux français, même, mais d'une antiquité de bon aloi […] ».
En mai 1943, Vermont rencontre discrètement les hommes des 4 secteurs. Mais la prudence n’est jamais suffisante. Conti est arrêté par la Gestapo. Vermont, méfiant, met en sommeil son groupe jusqu’au début de 1944.
Entrée en action du bataillon
2 terrains de parachutage sont homologués. Le premier, « Gauthier », est situé à Monségur. Il est identifié par la lettre « P » de « Peter ». « Les feuilles sont chassées par la tempête » est son message personnel. Le second, « Honoré », à Ladignac est identifié par la lettre « Q » de « Queen ». Son message personnel est « Si seulement vous vouliez m’aider ». Une équipe est constituée pour écouter Radio Londres. 20 hommes parmi les meilleurs à qui l’on demande la plus grande discrétion sont sélectionnés pour participer aux opérations de récupération.
Un soir, à 19 h, l’équipe d’écoute radio entend « les feuilles sont chassées par la tempête ». A 21 h 30, le message est confirmé. L’équipe est alors rapidement réunie et part à pied, par groupe de 4 ou 5, vers la destination prévue. Arrivés à 23 h, les hommes prennent leurs postes de guet, l’attente commence. Malgré le passage d’un avion et l’émission par Vermont de l’indicatif du terrain, rien n’est largué par l’aéronef. Quelques jours plus tard, Vermont apprend que le responsable régional des parachutages avait programmé 2 largages avec le même indicatif. Cette regrettable confusion laisse les fumélois sans armement. Heureusement, Vermont réussit à négocier avec le groupe de Monflanquin la cession d’une partie de leur parachutage. Après avoir récupéré leur chargement à l’Ouest de Salles, ils vont le cacher chez Ernest Gilis, à « Augère », sur la commune de Cuzorn.
Le 11 mars 1944, Radio Londres annonce 2 parachutages simultanés, l’un sur « Gauthier » et l’autre sur « Honoré ». Faute d’effectifs suffisants, Vermont décide de se concentrer sur celui de « Gauthier ». Rendus sur le terrain, de nouveau il faut attendre. Soudain, des avions passent au-dessus d’eux par vagues successives. Quelques dizaines de minutes plus tard, d’immenses lueurs zèbrent le ciel au Sud du Lot. Les traits caractéristiques des tirs de la DCA allemande rayent la nuit. Il s’agit du bombardement de la poudrerie de Toulouse par les Alliés. A 1 h 30, un quadrimoteur se présente. Vermont envoie le code morse de la lettre « P » (.--.). L’avion fait demi-tour puis survole plusieurs fois le terrain. Enfin 13 parachutes descendent lentement vers le sol. L’ensemble du largage est immédiatement caché dans les buissons voisins. L’avion fait un dernier passage pour les saluer d’un mouvement d’ailes. L’opération a duré environ 25 minutes. 12 cylindres et une mallette radio sont chargés à bord du camion conduit par Guy Redoulès. Le matériel reçu est amené à Montayral pour être dissimulé dans un bâtiment en réparation appartenant au chef cantonnier Verdier.
Quand il s’agit d’armement, 2 types de conteneurs sont largués : celui destiné au sabotage pour équiper 8 hommes (il contient du platic, des détonateurs, du cordeau bickford, divers engins explosifs, des allumettes et parfois des révolvers avec chargeurs et balles) ; celui destiné au combat pour équiper 8 hommes (il contient des mitraillettes Sten, des poignards, des révolvers, des grenades Gammon…).
Le 11 avril, Vermont apprend qu’une colonne allemande traque les maquis autour de Belvès et qu’un détachement stationne près de Saint-Front-sur-Lémance. Le jour même, Radio Londres annonce 2 parachutages pour les Fumélois, le premier à Pech Peyrou et le second à Montayral. Pour récupérer celui de Pech Peyrou, Vermont fait appel à Gilis et à ses hommes pour compléter l’équipe, pendant qu’il s’occupe avec les siens de celui de Montayral. 19 cylindres sont récupérés sur chacun des terrains.
Le 8 mai a lieu un nouveau parachutage. L’imminence du débarquement allié met la pression sur Vermont : il faut former les hommes au maniement des armes et des explosifs. Des séances d’entrainement sont organisées à partir du 9 mai.
Le 16 mai, une alerte est déclenchée. Les Allemands sont soupçonnés de planifier une attaque des maquis sur le Fumélois. Des mesures de précaution sont prises, en particulier pour les nuits. Les hommes vont dormir dans les fermes amies situées sur la rive gauche du Lot, coté Montayral. Le dimanche 21 mai, les Allemands traversent Fumel. Leur objectif est le nord du Fumélois. Le régiment « Der Führer » appartenant à la 2ème Division « Das Reich » se répand de Salles à Frayssinet-le-Gélat en perpétrant des massacres, des fusillades, des pendaisons, des rafles commecelle de Lacapelle-Biron.
Le 30 mai, le parachutage prévu à Pech Peyrou échoue en raison des mauvaises conditions atmosphériques. Plus grave, un des « parachuteurs » est arrêté à « Tesquet » sur la commune de Cuzorn par les gendarmes, de plus en plus présents sur les routes. L’homme, en échange de sa liberté, donne le nom de son chef direct. L’heure est grave. Si la Gestapo est informée, tout le groupe risque de tomber. Par chance, l’adjudant de la Gendarmerie de Fumel accepte un marché. Il est obtenu parce que Vermont possède un appui en la personne du capitaine de Gendarmerie d’Agen. L’affaire s’arrête là.
Le débarquement allié est imminent. Il est temps que le bataillon « Geoffroy » soit pleinement opérationnel. Lire la suite…