Tournon

  

Tournon-d'Agenais : sur le Chemin de Mémoire

 La répression allemande



Le statut des Juifs et l’assignation à résidence de Juifs étrangers à Tournon-d’Agenais

    « Nous, Maréchal de France, chef de l'État français, Le conseil des ministres entendu, décrétons : Article premier. Les ressortissants étrangers de race juive pourront, à dater de la promulgation de la présente loi, être internés dans des camps spéciaux par décision du préfet de leur résidence. »

    Cette phrase, extraite des nombreux textes du gouvernement de Pétain, illustre l’attitude des autorités de Vichy à l’encontre des Juifs étrangers, mais aussi de ceux de nationalité française. Le statut des Juifs est promulgué en septembre et octobre 1940. Il exclut de la société la partie de la population de confession israélite. Les Français juifs sont empêchés d’exercer leur profession et les Juifs étrangers sont assignés à résidence dans le Sud de la France.

    Sur proposition du Préfet de Lot-et-Garonne, Tournon-d’Agenais devient, le 6 janvier 1942, un centre régional pour l’accueil des Juifs étrangers. Il est prévu d’accueillir 183 personnes. Ce nombre n’est pas atteint, mais il dépasse largement la cinquantaine possible. De l’aveu même du chef de bureau de la préfecture, au moment de sa visite le 9 février suivant, certains logements sont dans un état déplorable. Un rapport fait état de « 30 isolés logés dans la salle des fêtes, 25 au Foirail, 30 dans une maison de 8 pièces, 15 dans une maison de 4 pièces ».

    La surveillance de ces assignés est stricte. Ils ne doivent pas se livrer à des activités politiques ou professionnelles. Ils ne peuvent quitter la commune qu’avec l’autorisation du Préfet. Aucun financement n’est prévu pour assurer leur subsistance, ce qui plonge certains dans une grande précarité. Quelques enfants fréquentent l’école communale.

Les rafles, la solidarité sanitaire et la Résistance

    Les premières rafles de Juifs en France débutent dès 1940 en zone libre mais n’ont pas un caractère systématique. A la demande des autorités allemandes, Vichy planifie, en juin 1942, l'opération « Vent printanier ».  Ce plan prévoit de déporter, de France vers l'Est de l’Europe, 110 000 Juifs âgés de 16 à 50 ans. Le point culminant de cette déportation se situe entre le 16 et le 17 juillet 1942, c’est la rafle du Vel d’Hiv à Paris. Le 26 août1942, le rabbin Fuks d’Agen prévient les Juifs de Tournon de l’imminence d’une rafle. 5 sont arrêtés par les gendarmes, et envoyés au camp de Casseneuil. Le 3 septembre, ils sont transférés à Drancy avant d’être déportés à Auschwitz. Aucun ne survivra. A Casseneuil, les autorités de la collaboration avec la Solution Finale allemande, concentrent tous ceux qui sont destinés à alimenter la monstrueuse machine à tuer des nazis. Mais la compassion de certains permet de sauver des vies. C’est le cas du jeune Sally BERGMAN, âgé de 14 ans. Son père Rubin reconnait un officier belge dont il avait fait la connaissance à Tournon. Il parvient à le convaincre de sauver son fils. L’officier établit de faux papiers prétextant que Sally réside seul à Caumont et non à Tournon. Sally est relâché, et rentre à Tournon. Madame DIEULAFAIT, sa logeuse lui remet l’argent laissé par sa mère avant son départ. Sally prend le train à Penne-d’Agenais. Arrivé à Agen, le rabbin Fuks lui remet de faux papiers qui lui permettent de rejoindre Annemasse où un passeur l’emmène en Suisse.

    Parmi les assignés juifs résidant à Tournon, il y a au moins deux médecins. Malgré le sort inique qui leur est réservé, ils n’hésitent pas à s’investir pour assister les habitants dans la mesure où les médecins locaux ne peuvent pas faire face, c’est le cas du docteur WEISMAN qui prend en charge les patients du docteur TOUSSAINT quand celui-ci a des obligations. Quant au docteur VALENTIN, Il a réussi à persuader le chef de la gendarmerie de mettre un foulard rouge à la fenêtre quand il avait connaissance d’une rafle. il est autorisé par les autorités à exercer son métier. Le docteur VALENTIN soigne de nombreux Résistants, les cas les plus légers dans la boulangerie située au bas de Tournon. Voisin du café du Commerce, le docteur VALENTIN se rend régulièrement dans ce café, le soir, pour écouter Radio Londres, les fenêtres bien calfeutrées, pendant que certaines personnes font le gué.

Un barrage de gendarmerie fatal

    A Tournon, le 12 janvier 1944, la gendarmerie reçoit l’ordre d’établir un barrage en bas du village, sur le quartier du Foirail. Au cours de la nuit suivante, à 3 heures du matin, un vélomoteur, suivi d’une voiture, arrive de la route de Fumel et se heurte au barrage. Surpris par le coup de sifflet, le motocycliste s’arrête. Au moment de mettre sa machine sur cale, il reçoit une balle dans les reins, tirée à bout portant par un gendarme. La voiture suiveuse est entourée par les gendarmes et ses deux occupants sont neutralisés. Chacun d’eux est armé d’un révolver, tout comme la personne qui gît au sol. 

    Le corps de la victime est transporté à la gendarmerie où l’on procède à son identification. Une carte d’identité au nom de BARAUD Jean, né le 18/01/1917 à Doullens dans la Somme et établie à Vaillac dans le Lot, est trouvée sur lui. Après vérification, il s’avère qu’elle est fausse.

    L’interrogatoire des deux occupants de la voiture ne livre aucun détail probant. A part avoir décliné leur véritable identité, ils prétendent ne rien savoir sur celle du mort, sauf qu’ils le connaissent sous le prénom de « Jean Marie ». Ils disent tout ignorer de ses activités. Le premier possède une fausse carte d’identité. Il finit par admettre qu’il s’appelle Jean BERTIN, qu’il est réfractaire au S.T.O., et qu’il a rencontré Jean Marie par hasard, à qui il a demandé s’il connaissait des maquis dans la région. Le deuxième est Maurice HENRIOT. Il s’est évadé de la prison d’Eysses, le 3 janvier 1944 avec 54 détenus. Il reconnaît le vol du cyclomoteur à Laroque-Timbaut, et celui de la voiture à St-Martin-le-Redon. Il dit ne pas connaître la véritable identité des autres personnes. Partis de St-Martin-le-Redon, Jean Marie est en tête avec sa moto pour indiquer le chemin. Ils doivent livrer les deux machines à la Croix-Blanche en passant par Fumel puis Tournon, où ils sont arrêtés au barrage de gendarmerie. BERTIN est accusé d’activité terroriste et de port d’armes. Il est déféré à la maison d’arrêt d’Agen, puis ce sera Compiègne et le 18 juin 1944, il est déporté vers les camps allemands où il décède en février 1945. Maurice HENRIOT est également emprisonné à Agen, avant d’être déporté en Allemagne.

    Un indice concernant l’identité de Jean Marie figure en marge de son acte de décès à la mairie de Tournon, il est noté « Bruckman ». Dans son livre « Lot-et-Garonne terre d’exil et terre d’asile ». Marie-Juliette Vielcazat-Petitcol signale la mort d’un juif, appartenant au groupe « PROSPER », le 13 janvier 1944 à Tournon-d’Agenais. Il est raisonnable de penser qu’il s’agit bien de Jean Louis BRUCKMANN, fils d’une famille de Juifs allemands, réfugiée à Paris en 1937, puis dans le Lot-et-Garonne en septembre 1939. Les parents ont été déportés le 09/09/1942 à Auschwitz. Une plaque en souvenir de Jean Louis BRUCKMANN a été apposée par la mairie de Tournon sur le mur de la gendarmerie. Cette stèle a été dévoilée le 03/11/1944, par maître René HAYOT, avocat, résistant, maire de la commune, lui-même Juif parisien, réfugié à Tournon en 1942.

Les évènements tragiques du 3 juillet 1944         

Le contexte

    Pierre FOURNIE, chef du sous-groupe n° 10 de Dausse vient de recevoir l’ordre de déménager son camp de Dausse vers le château d’Alcastel à Cazideroque. Il doit, en même temps, aller récupérer des armes dans une ferme du côté de Libos.  La totalité des hommes monte à bord de deux véhicules, une traction Citroën et un petit autobus de dix places. Pierre FOURNIE a également un rendez-vous à Tournon, au café LACOMBE, avec une personne qui doit lui remettre une malle. 

    Le lundi 3 juillet 1944 au matin, en passant par le Foirail de Tournon, Pierre FOURNIE, accompagné de Paul André TESTUT, descend de la voiture puis entre dans le café LACOMBE. Pendant ce temps, les véhicules partent récupérer les armes à Libos.      

    Au même moment, une colonne allemande, venant de Cahors, progresse vers Tournon, en direction de Villeneuve-sur-Lot. C’est un détachement de 1 500 hommes sur une centaine de camions qui est issu de la 11ème Panzer Division de la Wehrmacht, recomposée en 1944, et bien armée. Les véhicules arborent un emblème représentant un squelette brandissant une épée et enveloppé d’un suaire, d’où le nom de « Gespensterdivision » ou « Division Fantôme ». Elle a sévi en Dordogne, en particulier à Mussidan, le 11 juin 1944. 

Témoignages des résistants

    Manuel SALAVERIA, Républicain espagnol qui appartient au groupe de Pierre FOURNIE, écrit dans un rapport non daté : 

    « Le 3 juillet 1944 départ de Dausse avec tous nos camarades dans deux véhicules pour aller récupérer des armes. A notre passage à Tournon, nous avons laissé notre chef FOURNIE au café LACOMBE qui avait rendez-vous avec un ex-gendarme pour récupérer une malle contenant des armesNous avons continué direction Libos vers une ferme où était camouflé du matériel militaire.

    A notre retour nous nous sommes arrêtés à côté du café LACOMBE direction Agen,  pour récupérer notre chef FOURNIE, M. RICARD et la malle. On venait juste de descendre de l’autobus que j’ai aperçu l’automitrailleuse qui arrivait direction Cahors, elle a ouvert le feu suivie par le reste de la colonne.

    Nous nous sommes réfugiés derrière le pâté de maisons et vue l’importance de la colonne allemande quelqu’un a crié « chacun pour soi ». Je suis parti en direction du Boudouyssou et après maintes péripéties je suis arrivé à Dausse.

    Le lendemain j’ai retrouvé un camarade rescapé Daniel CHAUVIN et nous avons rejoint à pied le PC du bataillon Jack et du groupe MONTES au Pech del Treil.   

P.S. notre mission consistait à récupérer les armes et installer notre campement autour du château de Cazideroque ce qui justifiait la présence de tous les camarades du sous-secteur 10. »

    Georges CHAUVIN, chef adjoint du groupe « VENY » du secteur 10 de Dausse écrit le 23 mars 1945 :

    « Le 3 juillet 1944 vers 9 heures en mission pour la récupération des armes et de matériel, à notre passage à Tournon, nous avons laissé le chef FOURNIE au café LACOMBE afin de recueillir des renseignements. A notre retour vers 10h30, la voiture qui nous précédait et devant prendre au passage le chef FOURNIE s’est arrêtée à environ 150 mètres du croisement des routes 656, 661 et du chemin départemental 102, pour une cause inconnue.

    Arrivant aussitôt avec la deuxième voiture nous nous sommes arrêtés pour nous rendre compte de cet arrêt improvisé. Immédiatement j’ai désigné un volontaire à l’intersection des routes 656, 661 et du chemin départemental 102, afin d’assurer notre sécurité pendant l’arrêt. C’est à ce moment même, alors que ce dernier se rendait à son poste, une voiture mitrailleuse d’une colonne allemande a débouché au carrefour du Foirail, venant de la direction de Cahors, nous apercevant celle-ci a stoppé et le signal a été donné à toute la colonne, c’est alors qu’a eu lieu l’engagement au cours duquel la voiture mitrailleuse allemande a ouvert le feu immédiatement suivie des armes automatiques de toute la colonne.

    Au cours du combat qui a duré 2 heures environ, les volontaires ci-après ont été tués : GISTLIN Maurice, MALARDEAU Henri, GRUMBLAT Maurice, DELRIEU Jean Noël.  D’autre part le chef FOURNIE et le volontaire TESTUT faits prisonniers ont été fusillés vers 15 h 45 sur la place du Foirail après avoir été sauvagement torturés. »      

Témoignages des villageois

D’après une habitante de Tournon

    Cette jeune personne travaille à l’hôtel des Voyageurs de Tournon, sur le Foirail. Elle est chargée d’aller dans les fermes aux environs de Tournon pour chercher du ravitaillement, en vélo bien sûr, afin de préparer les repas des pensionnaires. M. AUTESERRE, qui a un garage, près du café, lui donne des documents à remettre à maître René HAYOT. réfugié dans une ferme. Elle sait que ces documents émanent de la Résistance. Elle agit comme un agent de liaison pour les groupes « VENY », car les femmes parviennent à passer les barrages plus facilement que les hommes.

    Comme chaque jour, elle monte l’eau dans les chambres des pensionnaires (l’eau courante n’existe pas dans les maisons, il faut aller la chercher à la fontaine). Parvenue à l’étage, elle entend du bruit et elle voit par la fenêtre la colonne allemande. Elle se précipite dans l’escalier pensant avoir le temps d’avertir les Résistants qui sont dans le café. En bas de l’escalier, c’est un soldat allemand qui l’attend et lui fait signe d’entrer dans le café rejoindre les autres. Elle voit un soldat Allemand blessé et qui saigne. Tombé d’un camion, il est emmené dans le café voisin pour être soigné.

    Les Allemands vident les maisons de leurs occupants et les fouillent de fond en comble. La jeune fille et une femme de gendarme qui a un bébé de 3 mois s’enfuient dans un champ de maïs, situé derrière la gendarmerie. Une demi-heure plus tard, les deux femmes sont repérées par un Allemand qui les enferme pour le reste de la journée. 

    En voyant les Allemands, un Résistant, présent dans le café de Mme LACOMBE, a le temps de jeter son arme. Il se précipite vers une maie où il y a un cochon. Il se met à le frotter avec la plus grande vigueur avec la paille qu’il vient de ramasser. Les soldats passent sans lui poser de questions. Ses camarades, partis en courant vers la fontaine, sont pris pour cibles…

D’après deux élèves de l’école communale de Tournon

    Denise a 12 ans, elle habite rue de la Citadelle, les fenêtres donnent sur la place du Foirail et la campagne environnante. Son père est un militaire, fait prisonnier en 1940, et détenu dans un stalag, il est rentré très affaibli. En 1944, il est chargé du ravitaillement à Tournon en supervisant l’abattage des bêtes. Son laisser-passer lui permet de circuler librement dans le département. Il assure, également, le rôle d’agent de liaison pour les groupes « VENY ». Denise a fait sa communion la veille, dimanche. Le lundi, elle ne va pas à l’école, car le matin, elle doit assister à la messe avec ses camarades. Ce jour-là, son frère Pierre âgé de 18 mois n’arrête pas de pleurer. Sa famille a aussi en pension une fillette de Bordeaux qui pleure aussi. Le père de Denise vient d’être dénoncé. Des Allemands et des miliciens français le cherchent mais ils se trompent de maison, ils habitent un peu plus loin dans la rue. Heureusement, car des armes sont cachées chez eux. Dissimulée derrière une glycine, Denise observe ce qui se passe en contre bas. Elle se souvient d’avoir vu des Mongols dans les rangs allemands.  D’après elle, un officier aurait été blessé. C’est la raison pour laquelle les Allemands ont pris des otages et ils auraient dit que s’il mourrait, ils raseraient le village.
 

    Comme chaque matin, André LAURENT, âgé de 12 ans, prend son petit-déjeuner sur le balcon quand il aperçoit des camions, au loin sur la route de Cahors, pour lui ce sont les camions des Résistants qui font mouvement, le débarquement allié ayant eu lieu le 6 juin dernier. Mais en regardant la colonne approcher, les adultes identifient les véhicules comme étant allemands. Le père d’André, Jean LAURENT, ouvre la porte du café, afin que le docteur WEISMAN puisse entrer visiter la grand-mère de la famille HOLTZER qui est souffrante à l’étage. André, avec ses grands-parents Abdon et Léonie, observe avec intérêt ce qui se passe sur le Foirail. Ils voient la colonne s’arrêter net, dans un grand fracas, devant le Café LACOMBE où stationne une voiture. Dans ce véhicule, arrivant de Monségur, il y a le jeune Jean Noël DELRIEU, âgé de 19 ans. Il est venu à Tournon, son village natal, pour fêter son entrée dans le maquis avec ses copains. Les Allemands le fusilleront dans l’après-midi. Toute la journée, André LAURENT va observer le déroulement des opérations.

Pillages, arrestations, tortures et meurtres où comment terroriser les « terroristes »

    Dans leur frénétique recherche d’armes appartenant à la Résistance, les Allemands découvrent dans le garage d’Abel AUTESERRE, à côté du Café LACOMBE, des camions abandonnés en 1940 par l’armée française et que le garagiste avait récupérés. Abel AUTESERRE et son fils sont arrêtés et déportés, seul le fils est revenu de déportation.

    Deux batteries d’artillerie légère sont positionnées dans la cité pour balayer toute la campagne environnante. L’une d’entre elles tire un obus qui tombe sur le camion de tête du groupe « KLEBER », de retour d’Agen, ce qui bloque le convoi en route pour les carrières du Pech del Treil. Les maquisards ont été prévenus du risque encouru par les habitants alors que le cyclomotoriste d’avant-garde venait d’être abattu sur la route qui gravit la côte Sud de Tournon.

    La position géographique, en hauteur, du village favorise le contrôle total des environs. Toute personne qui essaie de se mouvoir dans les champs cultivés où les prés se retrouve sous le feu allemand. François LARHYDON est tué devant chez lui. Le docteur WEISMAN est abattu devant chez les LURENTS en essayant de rebrousser chemin sur sa moto. Après la fouille des maisons et le pillage et l’incendie de certaines d’entre elles, les Allemands regroupent 24 otages sur la place du Foirail, ils vont être les témoins du martyre de Pierre FOURNIE et de Paul André TESTUT. Sauvagement torturés pendant leur interrogatoire, ils sont fusillés vers 15 h, sans avoir parlé.

    Les Allemands, certains de l’effet de sidération qui submerge les habitants quittent Tournon vers 16 h 30, tout en proférant des menaces à l’encontre de celles et ceux qui appartiendraient aux maquis ou qui apporteraient la moindre aide aux « terroristes ».

Comment la Wehrmacht envisage la neutralisation de la Résistance ?

    L’ordonnance dite « Sperrle-Erlass », promulguée le 12 février 1944 par le Haut Commandement allemand à l’Ouest prescrit à la troupe « de répondre immédiatement par le feu quand elle serait attaquée par la résistance française ». l’ordonnance précise que « si la riposte allemande atteignait des civils, ce fait serait regrettable, mais serait exclusivement la faute des "terroristes". Si les tirs provenaient d’un bâtiment, les soldats devaient incendier cette maison. ». elle ajoute que « dans la situation actuelle, il n’y a pas de raison de sanctionner le chef d’une unité qui imposerait des mesures trop sévères. Au contraire, il faudra punir un chef trop souple, car il met la sécurité de ses hommes en danger. ». Le 8 juin 1944, les directives du commandement allemand concernant les départements de la Dordogne, du Lot et de la Corrèze, stipulaient que « pour rétablir l’ordre et la sécurité, il faut prendre les mesures les plus draconiennes pour détourner par la terreur les habitants de ces régions continuellement infestées pour qu’elles perdent enfin l’envie d’accueillir les groupes de résistants et d’accepter d’être gouvernées par eux et en avertissement pour la population entière. ».

A la mémoire des victimes du 3 juillet 1944

    A l’initiative d’un groupe de femmes de Tournon faisant partie de « Femmes Françaises », dont la boulangère Mme CARLES, un appel à dons est lancé pour ériger un monument aux morts. Ce dernier est installé sur le Foirail. De nos jours, il est situé au milieu du rond-point qui a remplacé le champ de foire.



Juste parmi les Nations

    Le 24 novembre 1997, Abdon Laurent, propriétaire du café du Commerce au moment des faits est inscrit sur la liste des « Justes Parmi Les Nations » à Yad Vashem pour avoir secouru la famille HOLTZER.

    Originaire d’Anvers, la famille HOLZER composée des deux parents, de la grand-mère, d'une fille et d'un fils Maurice, quitte la Belgique en mai 1940, lors de l’attaque de l’armée allemande sur le front de l’Ouest. Elle échoue à Bagnères-de-Luchon. En janvier 1943, la famille est assignée à résidence à Tournon-d’Agenais. Ils ont l’obligation de de se présenter à la gendarmerie tous les dimanches. Il leur est interdit de quitter le village. Les HOLZER sont Juifs pratiquants. Tout le village est au courant de leur présence , sans que cela pose le moindre problème.

    La famille LAURENT éprouve de la sympathie pour les HOLTZER. Elle met un logement à leur disposition et trouve des refuges dans les environs lorsque le danger devient trop grand. Chaque soir, les HOLTZER sont invités à écouter la BBC chez les LAURENT. Le 3 juillet 1944, le jeune Maurice HOLZER se retrouve parmi les 24 otages. Tous sont collés au mur devant la gendarmerie face aux mitraillettes allemandes. Lors de la fouille des maisons, les Allemands arrivent devant celle des HOLTZER, siruée face au café d’Abdon LAURENT. Les HOTLTZER se sont cachés dans la cave. Abdon LAURENT réalise immédiatement ce qui risque de se produire. Debout devant sa porte, courageusement, il dissuade les soldats de fouiller la maison. Il sauve ainsi la famille juive d’une déportation certaine. Lors du contrôle de l’école communale par un officier nazi, personne ne dénonce la petite sœur de Maurice, âgée de 8 ans.

    Le 8 septembre 1943, les gendarmes arrêtent M. HOLZER, mais il est relâché le soir même. La vigilance d’un gendarme d’origine alsacienne, l’aide apportée par la famille LAURENT et celle du docteur VALENTIN, lui permettent d’échapper à une nouvelle rafle. Grâce à eux, les HOLZER traversent ces années noires de l’occupation. Ils quittent Tournon en avril 1945.

Discours de Claude FOURNIE,  fils de Pierre FOURNIE – 3 juillet 2016 – inauguration d’une borne commémorative


 

    « Pierre FOURNIE, dit « Ménut » et « le Marin » dans la Résistance. 

    PAPA…, Je n'ai jamais pu t'appeler ainsi, mais aujourd'hui à l'occasion de cette cérémonie, j'ose enfin m'exprimer et raconter un peu de notre histoire. 

    Il y a 72 ans, le même jour entre 10 h, et 16 h, des hommes courageux et volontaires ont laissé leur vie pour un idéal.  J'avais 16 mois, mon père Pierre FOURNIE était parmi eux. Je me suis construit sans ce père, ma mère jeune veuve de 21 ans a tout fait pour me rendre heureux, mais n'a jamais pu remplacer l'amour, l'autorité, de celui qui avait été victime du nazisme. 

    Il était le Chef, il avait des informations qui intéressaient vivement l'occupant et pour ces raisons on l'a interrogé avec son camarade André TESTUT. Devant leur silence, l'ennemi les a battus, mutilés puis fusillés. Cela a duré des heures, sous le regard des 24 otages.

    Je peux m'imaginer qu'il avait très vite compris que sa vie pouvait être arrivée à son terme, que pensait il dans ces moments de grand désarroi ?

    Se disait-il : « Je persiste à ne rien dire pour ne pas trahir mon engagement de résistant ou je parle et j'espère pouvoir reprendre une vie normale auprès de ma femme et de mon bébé ? »

    Qu'aurai-je fait à sa place ? Aurai-je eu le courage d'aller aussi loin dans l'abnégation pour un idéal concernant le bien et le confort de toute une nation ?

    Je n'ai pas de réponse et je ne souhaite pas avoir à faire ce choix. 

    J'ai grandi en l'absence de ce père et dans l'ombre de son souvenir, j'avais 11 ans lorsque nous avons reçu un colis dans lequel il y avait : La Légion d'honneur, la Croix de Guerre et la Médaille de la Résistance, tout cela à titre posthume. 

    Aujourd'hui ce souvenir est matérialisé par la pose de cette plaque commémorative du chemin de Mémoire et j'en suis heureux. Je partage ces moments de satisfaction avec les familles des victimes et tout particulièrement le petit fils d’Albert Grumblat qui tous les ans n'hésite pas à venir de Paris pour honorer la mémoire de son grand père. 

    Au nom de tous les descendants de ce groupe de résistants que le chef FOURNIE, avait su regrouper, catholiques, spagnols, juifs, russes, mais qui tous, avaient soif de justice et de liberté, je remercie les personnes qui œuvrent pour que ces événements restent dans notre mémoire et je suis heureux que mes enfants et petits-enfants tous présents aujourd'hui participent à cette cérémonie, ainsi beaucoup de maillons sont là ce soir. » 

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